Les rāmen, encore peu connues en France, sont un élément central de la cuisine nipponne. Ces copieuses soupes de nouilles servies dans de grands bols sont pourtant assez récentes au Japon. En l’espace d’un siècle à peine, elles sont devenues emblématiques de la cuisine populaire, de la cuisine des rues ; les rāmen font partie du quotidien des Japonais, jeunes ou vieux, riches ou pauvres, et sont déclinées localement de mille façons. Gros plan sur ce plat versatile qui révèle un véritable pan de culture.
L’histoire des rāmen prend ses racines en Chine, le berceau de la nouille. Le savoir-faire chinois est millénaire : l’Institut chinois d’archéologie a récemment mis à jour des nouilles âgées d’environ 4000 ans à Lajia, dans la province de Qinghai. Au Japon, la nouille est bien plus récente ; les Japonais ont principalement mangé du riz pendant des siècles, puis ont adopté cette idée chinoise au Moyen Âge.
Un plat d’immigrés rapidement adopté
Au début, les Japonais ont fait leur truc, comme d’habitude, créant leurs propres grands types de nouilles, comme les soba, les udon, etc. Et puis récemment, à la fin du XIXème siècle, les rāmen sont arrivées en pays nippon grâce aux immigrés chinois.
Ceux-ci avaient – et ont toujours – de grandes difficultés à laisser leur gastronomie derrière eux en quittant leur pays ; ils ont apporté au Japon une recette nouvelle, un plat consistant pour les travailleurs affamés des Chinatowns de Kōbe et Yokohama : les rāmen, des nouilles de blé servies dans un bouillon de porc bien chaud et garnies de viande, de légumes et d’autres petites choses amusantes. Le succès fut immédiat.
Vendues aux côtés des gyōza par des marchands ambulants, ces soupes de nouilles informelles, généreuses et bon marché qui réconfortaient les Chinois expatriés ont rapidement conquis le peuple japonais.
La même chose s’est produite un peu partout en Asie, à différentes époques et dans des circonstances diverses ; aujourd’hui, tous les pays marqués par l’influence chinoise ont leur propre version des nouilles au bouillon, enfin leurs propres versions, car ce plat est déclinable à l’infini.
Un plat très chinois donc, et très récent au Japon – d’où le néologisme rāmen / ラーメン, probablement issu du chinois lā miàn / 拉麺 qui signifie « nouilles tirées ». Par rāmen, le Japonais entend deux choses : le plat en soupe et les nouilles en elles-mêmes. Car ces nouilles-là n’ont rien à voir avec ce que le Japon produisait jusque-là. Le pays du Soleil-Levant s’était spécialisé dans des pâtes majoritairement raides et impeccablement coupées au couteau, des blanches, des brunes, des épaisses et des fines. Rien ne ressemblait à ces nouvelles venues jaunes, ondulées et élastiques.
Des dizaines de types de rāmen
En un siècle à peine, le Japon s’est complètement approprié ces nouilles. Dans certains coins on les appelle encore chūka soba / 中華そば, c’est-à-dire « nouilles chinoises », mais dans les faits, elles sont aujourd’hui un pilier de l’alimentation japonaise. Il existe des centaines de types de rāmen bien qu’elles soient en règle générale toutes préparées avec les mêmes ingrédients. Elles se composent de farine de blé, de sel, d’eau et de kansui / 環水, la solution alcaline (ou basique, à pH élevé si vous préférez) à l’origine de leur couleur jaune et de leur souplesse.
Les proportions changent légèrement d’un endroit à l’autre, aboutissant à des textures étonnamment variées, mais c’est surtout la manière dont les nouilles seront façonnées qui va déterminer leur consistance finale. Ces formes de la nouille sont associées à des villes, des terroirs.
Les rāmen peuvent être extrêmement fines ou très larges, ondulées ou plates, cylindriques ou anguleuses ; tout dépend où on se trouve au Japon. Les formes peuvent également varier au sein de la même municipalité : à Kagoshima par exemple coexistent une spécialité de nouilles extra-fines apportée par les Taïwanais et une variété extra-large dérivée des soba d’Okinawa. Un petit aperçu du nombre surprenant de styles différents est visible sur cette page.
On ne cuit pas directement les rāmen dans leur bouillon ; celui-ci est préparé à l’avance et servi brûlant au dernier moment. En matière de soupe, il existe quatre axes majeurs, du plus léger (assari / あっさりen japonais) au plus riche (kotteri / こってり) : le bouillon au sel (shio / 塩), à la sauce soja (shōyu / 醤油), au miso /味噌 ou au porc (tonkotsu / 豚骨).
… Et autant de types de bouillons
Ces appellations sont un peu vagues pour le novice : non, la version au sel, ce n’est pas simplement de l’eau chaude salée, dieu merci. En réalité, c’est un bouillon fin, léger et clair à base de sel et d’os de poulet ou de porc dans certains cas. La recette à la sauce soja, brune et claire, est quant à elle préparée à l’aide de sauce soja certes, mais également de poulet et de légumes.
Le bouillon au porc ou tonkotsu est pour sa part obtenu en faisant bouillir les os de la bête durant des heures jusqu’à dissoudre totalement leur moelle. On obtient un résultat épais et laiteux de couleur très claire. C’est un concentré de graisses, de minéraux et de protéines. La recette est ici.
Enfin, la version au miso – la plus récente – est composée d’une grande quantité de miso diluée dans un bouillon gras de poulet, de poisson ou de porc. Elle est riche, épaisse et légèrement acidulée.
Ça, ce sont les grandes lignes. Mais à partir de là et bien au-delà, tout est possible. On a ainsi créé à Tottori une recette qui reprend le principe du tonkotsu, mais en substituant le boeuf au porc : le résultat, appelé gyūkotsu, est très savoureux tout en étant moins gras.
Il y a les variantes locales, et puis toutes les recettes originales lancées par tel ou tel restaurant : une version au curry de mouton dans un établissement d’Ōsaka par exemple, une autre à la tomate chez le voisin, ou une superbe soupe à base de dashi et de lait de soja chez Mamezen à Kyōto, toutes les extravagances sont permises.
Des garnitures pour tous les goûts
Les garnitures des rāmen présentent elles aussi des particularités selon les régions : on optera pour le maïs et le porc haché agrémentés d’une noisette de beurre sur Hokkaidō par exemple, ailleurs vous aurez droit à des épinards, des pousses de radis, des algues, des champignons noirs ou encore du kamaboko / 蒲鉾, un gâteau de poisson.
Et puis il existe des garnitures-stars, qui s’imposent un peu partout comme des classiques : la ciboule, les pousses de soja, le menma / 麺麻 (des pousses de bambou marinées), les oeufs marinés (en japonais ajitsuke tamago / 味付け玉子) et surtout l’incontournable chāshū / 叉焼, de fines tranches de poitrine de porc braisée qui fondent dans la bouche. Pour tout savoir sur le chāshū, la recette est ici.
Avec tous ces styles de nouilles, de bouillons et de garnitures, les possibilités sont infinies. Je n’ai pas envie de vous pondre des listes, ce ne serait drôle ni pour vous ni pour moi ; je vous conseille donc de regarder cette carte interactive qui présente quelques variations locales célèbres.
Points de vente informels
Voilà pour les recettes. Mais le monde des rāmen ne se limite pas à la cuisine. Les usages liés à ce plat en disent long sur la culture japonaise contemporaine et méritent qu’on s’y attarde. Les points de vente peuvent prendre des formes très différentes aujourd’hui, mais à l’origine, les rāmen sont ce qu’il y a de plus informel : de la street food.
Et au Japon, la street food est une tradition. Elle est principalement vendue dans des échoppes à comptoir ou sur des stands mobiles qu’on appelle yatai / 屋台. À Fukuoka, la « ville des yatai », on peut manger de délicieuses rāmen dans la rue, assis sur des bancs, attablé directement sur les stands. Une cuisine de fortune est organisée autour du yatai, sur le trottoir.
La spécialité locale, appelée rāmen de Hakata, est servie dans un superbe tonkotsu bien riche. Le cuistot cuit les nouilles sur place, les fait joyeusement sauter pour les essorer – évidemment, on sait qu’elles ne tomberont pas par-terre, mais ça met quand même un peu de suspense – y ajoute du bouillon et quelques éléments de garniture. On se régale ainsi jusqu’à tard le soir, à la lumière de petites loupiotes.
Aussi informels qu’ils puissent paraître, ces points de vente restent assez bien équipés et à peu près sédentaires bien que montés sur roulettes. On peut faire plus traditionnel et plus minimaliste encore. Car certains yatai sont de véritables vestiges du début du XXème siècle et sont encore plus sommaires, plus compacts et plus mobiles que les stands en bois de Fukuoka.
Manger debout, pas de problème
J’ai croisé l’un des derniers vendeurs de rāmen de cette ancienne école au détour d’une rue sombre d’Ōsaka l’été dernier, vers 2 heures du matin. Son propriétaire, un homme âgé, tout petit et tout sec, tire son charriot à la force des bras chaque soir depuis 70 ans. Le yatai a été baptisé Hyaku Kiro / 百キロ, Cent Kilos en français – c’est son poids exact – et malgré sa taille extrêmement réduite, il sert à la fois de point de vente, de comptoir et de cuisine parfaitement mobile. Et il ne pollue pas.
Il y a juste la place nécessaire pour un peu de vaisselle, un gros réchaud à gaz, quelques ustensiles de première nécessité, une bassine d’eau et un mégaphone pour haranguer les passants. À ce propos, il faut préciser que la nuisance sonore dans la rue n’est absolument pas considérée comme un problème au Japon, cinq voitures peuvent passer en même temps en scandant des messages publicitaires, politiques ou religieux, assurant une cacophonie grotesque.
Quand on mange chez Hyaku Kiro, évidemment, on mange debout. Et on s’en fout. Oui, les rāmen sont informelles, et ça va jusque là. Les Japonais n’ont pas nécessairement le temps ou l’envie de manger assis. Ce n’est pas du tout obligatoire. Mais ça ne veut pas dire qu’ils mangent en mouvement, comme nous engloutirions un sandwich en marchant. Non, on peut manger immobile, mais debout. Comme les rāmen sont censées être avalées en un clin d’oeil, on ne passera pas une heure dans cette position de toutes façons.
On mange vite, en faisant des gros slurp de circonstance, car voyez-vous, faire du bruit en mangeant des nouilles, c’est bien. Nous autres, qui nous sommes pris une baffe pour ça quand nous avions 6 ans, avons un mal fou à émettre le même son décomplexé que les Japonais. Notre slurp est inhibé, ridicule, maladif ; c’est un slurp de bébé poli, inconfortable et maladroit. Et croyez-moi, même avec du temps et de l’entraînement, mon slurp est toujours aussi pathétique. On n’efface pas une éducation si facilement.
Une dose de réconfort dans un plat démocratique
De plus en plus, les Japonais font comme tout le monde, et les points de vente des rāmen ont tendance à se formaliser d’une manière qui nous est bien plus familière. De nombreuses chaînes ont ouvert des restaurants cossus, rustiques, ressemblant à des izakaya, où l’on mange assis sur des chaises, des tabourets ou des bancs. Le service reste très informel, mais on a des éléments qui changent radicalement la donne en comparaison aux yatai : on mange à l’intérieur, assis, on est attablé et non installé sur un comptoir avec le nez dans la cuisine, et on a même des serveurs.
Mais le rāmenya / ラーメン屋 (le restaurant de rāmen si vous préférez) reste un lieu où l’on n’a pas besoin de paraître. On peut débarquer à 2 heures du matin, seul et tout bourré, et manger salement une triple dose de nouilles, personne ne trouvera cela étrange ou déplacé. On mange vite et beaucoup, on vient se restaurer au sens propre du terme, reprendre des forces ; pour cela on n’a pas besoin d’être à deux ou de prendre son temps, de parler à qui que ce soit ou de mettre les formes. On est là pour manger.
Et même, plus que manger, se nourrir. Les rāmen sont l’expression parfaite de ce que les anglophones appellent comfort food de manière très pertinente. La nourriture-réconfort, ou la cuisine-refuge comme dit joliment mon ami Patrick Cadour, c’est celle qui vous remet les idées en place quand vous avez bu, qui vous remplit l’estomac avant de sortir vous défouler, celle qui vous réchauffe l’hiver et celle qui vous manque le plus quand vous êtes loin de chez vous. Les rāmen ne sont pas seulement un bol de nouilles, c’est aussi et surtout un bol de réconfort. Pas étonnant quand on considère que ce plat n’était là au départ que pour réconforter les travailleurs chinois expatriés.
Nourriture démocratique par excellence (et street food oblige), les rāmen sont également très bon marché. Du coup, il n’y a pas d’âge ou de classe sociale qui en soit privé. En moyenne, un bol de nouilles coûte entre 600 et 800 yens, soit 4 à 6,5 euros, et suffit largement à venir à bout des appétits les plus voraces. Dans mon quartier de pauvres à Ōsaka, de petits restaurants proposaient même des rāmen tout à fait correctes pour 350 yens, soit 2,5 euros.
Les rāmenya sont principalement ouverts le soir, en général dès 17h et jusqu’à très tard, et certains servent carrément 24/24h. Les clubbeurs y partagent un banc avec le papi qui travaille de nuit et la mémé qui est toujours là et qui dort dans un coin. On y passe tôt ou tard, pas d’horaires, le bouillon est toujours bien chaud et on n’attend pas plus de 5 minutes pour être servi. Pour payer l’addition, on a deux options selon le type d’établissement : on peut régler sa commande au comptoir, après manger, ou bien avant même de prendre place, en utilisant des guichets automatiques, comme on achète un ticket de métro.
Les rāmen vues du comptoir
Quand on mange des rāmen, ce qui est flagrant, c’est l’autonomie du client. On nous sert un bol de nouilles, et nous laisse à disposition plein de choses pour l’arranger selon nos goûts. Des sauces en pagaille sont là pour relever le bouillon, ainsi que des tsukemono (comprenez des pickles japonais) de moutarde, de gingembre ou d’autre chose selon la région. Vous avez aussi des graines de sésame, de l’ail séché et effilé, du piment séché, du poivre, et le fabuleux mayu, de l’huile d’ail noir.
Les couverts sont également en libre-service : on prend son verre comme un grand, on se débrouille avec la carafe d’eau commune, on choisit sa cuiller et ses baguettes, on ajoute un oeuf cru dans notre bol si ça nous chante, bref, on a le choix et la liberté de faire ce que l’on veut. Et pourtant, le chef reste juste en face, disponible, attentif aux demandes : il fait son travail en vous servant ce que vous avez commandé à la virgule près (type de bouillon, garnitures et cuisson des nouilles plus ou moins al dente), mais pour ce qui est des accompagnements et du reste, vous êtes seul maître.
Si je vous raconte tout ça, c’est parce que la Rāmen Week se tient en ce moment en France et ce sera l’occasion pour beaucoup de manger des rāmen pour la première fois. Pas mal de gens m’ont posé la même question récemment : où manger de bonnes rāmen à Paris ? Et à chaque fois, je suis très embêtée.
De bonnes rāmen à Paris ? Hmmmmm…
Embêtée parce que je sais qu’il n’y a en ce moment à Paris rien du niveau de ce que je peux manger au Japon. Et embêtée aussi parce qu’on me rebat les oreilles de Naritake Kotteri Rāmen dans le 2ème arrondissement, car c’est visiblement de l’avis général le meilleur restaurant de rāmen à Paris.
Je le crois sans problème. Mais je suis une habituée du quartier et je n’ai jamais eu envie d’y manger. Les odeurs, la vue des bols ne m’ont pas du tout emballée. Je ne suis pas sûre que « le meilleur de Paris » veuille dire que ce soit vraiment bon – du moins si on cherche à retrouver la même qualité qu’au Japon. Je ne dis pas ça parce que j’ai peur du gras et que leurs bols sont très, très gras, je dis ça parce que les rāmen peuvent être à la fois grasses et fines, c’est un art, et je crains que ces rāmen parisiennes ne soient pas à la hauteur. J’y irai un jour, histoire d’arrêter d’en parler avec des pincettes.
Enfin, si on y réfléchit un instant, vous trouvez ça normal de chercher une bonne baguette de pain à Djerba, ou un vrai petit-salé aux lentilles à Bogota ? On nous dit sans cesse de manger local, et on cherche tous pourtant à disposer de toutes les nourritures du monde à notre porte. Vouloir retrouver le goût de chez soi quand on est loin, c’est humain, et c’est comme ça que les rāmen sont arrivées au Japon, mais vouloir tout, partout, y compris ce qu’on ne connaît pas, ça n’a pas vraiment de sens.
Je n’ai pas envie de promouvoir un restaurant de rāmen parisien précis aussi et surtout en raison des prix qu’ils pratiquent. D’autant plus qu’on peut faire ses rāmen soi-même, en utilisant des ingrédients locaux. Rien que pour prouver que c’est un plat bon marché, voici la recette.
Mais bien entendu, ce ne sera qu’un aperçu. Pour goûter à tout l’univers des rāmen, et pas seulement aux nouilles, il n’y a pas de secret, il faut aller au Japon. Comme pour manger un vrai croissant encore chaud dans une rue piétonne qui sent bon le poulet rôti, il faut aller en France. Et c’est tant mieux.
Bonjour, et merci pour cet article qui comme souvent réveille beaucoup de belles choses en moi.
3 réactions :
– « il faut préciser que la nuisance sonore dans la rue n’est absolument pas considérée comme un problème au Japon »
J’aimerais relativiser cette phrase… car s’il est vrai que les japonais ont le goût pour les annonces aux haut-parleurs poussifs (quel souvenir insupportable dans une pharmacie où tous les vendeurs scandaient un même message (promotionnel ?) par dessus la musique de jeux-vidéo diffusée par les enceintes…), il me semble cependant que les rues de Tokyo sont bien plus silencieuses que celles de Paris. Pourtant ce n’est pas les voitures qui manquent, mais la différence m’a nettement agressée de retour en France. Peut-être que la largeur des rues change la donne ?
– « Mais le rāmenya reste un lieu où l’on n’a pas besoin de paraître. (…) On mange vite et beaucoup »
Un autre souvenir… Ma compagne et moi, débarquant à Tokyo, enrhumés, fatigués… premier ramen salvateur ! Dans le ramenya, du côté client une grand-mère, puis deux jeunes gothiques/anorexiques androgynes… Ni la vieille femme, ni les deux jeunes n’ont semblé offusqués par la présence de l’autre (ni par la notre d’ailleurs).
Inutile de préciser que tout ce joli beau monde a englouti son bol de nouilles en trois coups de slurp, alors que je commençais tout juste à en arriver à la moitié, déjà bien rassasié…
– « où manger de bonnes rāmen à Paris ? Et à chaque fois, je suis très embêtée. »
… soupir… vous avez raison, on ne devrait pas vouloir manger ailleurs ce qu’on fait très bien ici, et l’inverse aussi… mais… mais… soupir…
Personnellement je suis toujours en recherche de la recette idéale de bouillon à ramen… On veut la vôtre Camille !
C’est bon de démarrer la journée, même très tôt, par un article aussi brillant et de s’y trouver au détour d’une ligne, merci ma chère Camille. J’ai encore appris beaucoup sur le Japon, et, je me doutais bien que quelque chose ne collait pas avec ce qu’on nous sert à Paris ; j’y ai goûté deux ou trois bols de ramen très grossiers avant de m’en détourner, essentiellement au profit des soupes chinoises et « indochinoises ».
Je ne pense pas que je t’accompagnerai au Naritake Kotteri Rāmen, c’est trop déstabilisant de manger avec toi quand tu n’aimes pas quelques chose, mais je t’attendrai pas très loin pour aller te venger sur du crabe cru ou des takoyaki. Mais j’irai de mon côté incessamment sous peu et je te dirai ce que j’en pense, avec toute mon inexpérience du sujet. Être cité dans un tel article mérite bien un sacrifice.
Déjà, je déteste entendre « Le meilleur de paris » ou « Ca doit être bon car les japonais y vont », et on peut remplacer les japonais par n’importe quel autre peuple dans cette phrase : « Le meilleur far de Paris, c’est dans un bistrot de Montparnasse avec plein de bretons au comptoir » (alors qu’on sait bien où est le meilleur far de Paris).
Je suis allé mardi midi au Macéo, le lieu stratégique de la Ramen Week (c’est du japonais « week » ?), grâce à une copine vietnamienne qui a intrigué pour ne pas faire la queue, aussi impressionnante que décourageante, les passants croyaient qu’on y distribuait un truc gratuit… J’ai mangé une version étrange, avec quelques références à l’Italie, et c’était honnêtement bon mais plus dans la démonstration que dans le réconfort d’un bouillon aux pâtes.
C’est normal et plutôt rassurant qu’on ne trouve pas en France les mêmes bols de ramen, cela traduit que le lieu et sa culture, même relativement récente, sont des ingrédients indispensables, c’est d’ailleurs toute la trame de ce que tu écris… Cela dit, ne pas manger que « local » (et où ça s’arrête le local ?), c’est voyager par la table, comme on voyage par les livres, c’est l’imaginaire qui parle, et donc l’idée qu’on se fait d’un plat, autant que sa vraie nature.
Oh oui, sois mon goûteur ! Connaissance du plat original ou pas, quand on est exigeant, on sent bien si la qualité est là. Je te fais une totale confiance. J’ai vu ta photo des râmen de Macéo, effectivement, on était plus dans un délire tsukemen méditerranéennes (les tsukemen sont des râmen que l’on trempe dans une sauce et non des nouilles au bouillon, des râmen déstructurées comme dirait un coiffeur), pourquoi pas, mais pour une entrée en matière, difficile de faire plus déroutant.
Nous sommes une fois de plus complètement d’accord sur le dernier point, et c’est pour ça que je vais ravager ma cuisine à y faire bouillir des os de porc pendant des heures. Parce qu’on peut tout à fait faire des râmen en France si on veut (et si on est patient, il faut compter 48 heures pour un résultat parfait), mais autant les faire bien, histoire d’avoir un aperçu un peu réaliste de ce que mangent les Japonais. Certes, on n’aura pas les mêmes bruits, les mêmes ambiances, le même décor, mais le goût sera là, et c’est déjà beaucoup.
Merci pour tes articles, toujours fort intéressants, bien documentés, et très appétissants bien sur 😉
Coup de cœur pour le « chashu », à tester un jour (au Japon, bien sur !)
Le chāshū est très facile à faire ! Ça prend du temps si on veut une viande vraiment tendre et légèrement caramélisée, mais les efforts sont minimes. De plus, les ingrédients sont faciles à trouver et peu chers. Je donnerai la recette, c’est tout à fait faisable en France et c’est merveilleusement bon.
Excellente idée, merci, j’attends ta recette avec impatience pour tenter de réaliser moi même un chasu !
« Ramen week », ça me donne juste envie de faire des jeux de mots idiots.
Mais je vous épargne.
Ah, le bouillon, cet abime d’une force d’attraction irresitible, aussi mystérieux qu’un trou noir. Sait-on tout ce qu’il y a dedans ? Surement des choses inattendues pour qu’il soit aussi bon. Des têtes de coq? des pattes de poule ? ou bien…., non, pas besoin de savoir, pourvu qu’il nous reconforte si délicieusement et chaudement.
J’aime le ramen par son gout de bouillon alchimique ,et surout par son image, justement comme tu décris si bien » populaire ». Il y a une espece de mélancolie de petits travailleurs, comme cette petite lumiere du chariot ambulant au milieu de la nuit dehors pendant que les gens dorment.
Dans un pays aussi « speed » comme le Japon, le temps (une dizaine minute maximum ?) de se restaurer, souvent seul, est un moment assez spéciale. Parfois, l’idée que ce généreux bol de nouille est le seul interlocuteur reconfortant pour un travailleur me fait ressentir sa solitude face à la ville et le travail. D’ailleurs, certains resto de ramen sont equipés de cloisons et de machine receveuse de commande pour que le client ne croise personne si ce n’est que la main fantomatique du seveur… Le Japon est délicieusement obscure.
Dans la ville de Bordeaux se trouve un restaurant nommé le Fufu, spécialisé dans les nouilles. Durant mes études j’ai eu plusieurs fois l’occasion d’y manger, j’y ai même emmené une amie qui comme moi, s’y est régalée. Elle est récemment revenue d’un mois au Japon où elle a eu l’occasion de goûter des ramen bien locaux. Elle m’a dit que ça n’avait rien à voir, que c’était mille fois meilleur là-bas et depuis je me sens comme trahie par le Fufu que j’appréciais pourtant beaucoup, pensant naïvement qu’ils préparaient des plats aux goûts proches de ceux que l’on trouve sur l’archipel nippon.
C’est donc un fait : je n’ai jamais mangé de vrais ramen !
Cette « Ramen Week » m’a fait doucement rigoler. Les parisiens n’ont pas attendu cet événement pour goûter à ces nouilles, aussi « francisées » soient-elles. Et quand on voit les prix, j’ai davantage l’impression d’assister à un effet de mode qu’à un véritable désir de découverte. M’enfin…
Merci pour cet article très intéressant qui met l’eau à la bouche ! Plutôt qu’attendre de gagner au Loto pour enfin pouvoir payer un billet d’avion, je tenterais de préparer des ramen chez moi. Vous m’en avez donné envie.
Bonjour Clémentine, merci pour ce commentaire, je suis d’accord avec vous.
Pour le Japon, il faut relativiser : certes, les voyages coûtent cher en général, et le Japon n’est pas des moindres, mais c’est loin d’être aussi onéreux qu’on pourrait le croire. La vie là-bas coûte beaucoup moins cher qu’en France, on trouve des hôtels abordables si on cherche un peu et pour les billets d’avion, je me suis toujours débrouillée pour rester en-dessous du seuil des 500 euros aller-retour. Ce qui reste une somme, évidemment, je ne dépense jamais autant d’argent pour autre chose…
Bref, je ne suis pas en train de dire que c’est une bagatelle, loin de là, mais moi qui ai besoin d’y aller régulièrement pour le boulot et qui fais partie de ce que l’on appelle les travailleurs-pauvres (le journalisme ne paie plus, nous sommes beaucoup à vivre avec moins d’un smic chaque mois), j’arrive à m’en sortir. Je passe du temps à faire des calculs d’apothicaire et des économies de bouts de chandelles pour payer mon billet, je ne vis pas la grande vie là-bas certes, mais je peux vous assurer que j’en profite ! Bref, le rêve n’est peut-être pas si inaccessible. Ce n’est en tous cas, contrairement à ce que l’on entend souvent, pas le voyage le plus cher du monde. Loin de là.
En tous cas, je vais m’appliquer pour la recette, j’ai déjà fait un calcul du prix de revient par bol (bouts de chandelles obligent), on devrait rester autour de 2,5-3 euros si on prépare tous les petits accompagnements rigolos, et en-dessous si on les zappe au moins en partie. En fait, l’ingrédient principal, c’est le porc (poitrine, peau et os), et le deuxième ingrédient principal, c’est l’eau. Du coup, c’est forcément un plat bon marché, même quand on paie ses ingrédients au prix fort parce qu’on n’est pas restaurateur… Il serait bon de le rappeler à tous les clients des restaurants qui vendent des râmen à 10 ou 12 euros le bol !
Ce que vous dites me rassure et m’encourage dans un sens. Il m’a toujours semblé que ce voyage coûtait extrêmement cher, notamment d’après les témoignages de mes amis qui y sont allés. Cela-dit, tout dépend de ce qu’on y cherche. Si l’on compte faire les boutiques pour rapporter plein de choses, le budget doit grimper plus vite que si l’on désire simplement prendre son temps dans les villes ou les campagnes pour en découvrir les paysages…
J’habite malheureusement dans une partie de la France où le Japon est teeeeeeellement loin que c’est à peine si les autochtones en ont déjà entendu parler. Du coup, je me procure les ingrédients nécessaires aux recettes comme je peux et plutôt qu’aller là-bas, je tente de le faire venir sous mon toit… nous disposons heureusement de porc et d’eau, préparer des râmen dignes de ce nom ne devrait donc pas poser de problème ! Merci pour vos efforts à nous proposer des recettes aussi appétissantes que dépaysantes !
Bonjour Clémentine,
Je confirme à 100 % la réponse de Camille. On peut faire un excellent voyage au Japon pour un budget tout à fait correct. L’hôtellerie bon marché est très développée – c’est simple et modeste, mais parfaitement propre et calme. La cuisine que je qualifierais « de rue » est extrêmement abordable et, de mon point de vue, c’est la meilleure manière de véritablement découvrir la cuisine japonaise. Seul poste de dépense incompressible car sans réelle alternative : les déplacements à l’intérieur du pays, parfois assez chers (je pense notamment aux trains à grande vitesse), mais ni plus ni moins que dans les autres grands pays développés. Quant à l’avion effectivement, la grande fréquence des vols entre la France et le Japon fait qu’on trouve des tarifs très intéressants au vu de la distance, y compris sur des compagnies comme Air France, JAL ou ANA. Economisez un peu et allez-y, outre la découverte du pays en tant que tel, aller au Japon permet de faire tomber de très nombreux clichés sur ce merveilleux pays et ses merveilleux habitants.
J’adore Fufu !
Merci pour ce brillant article.
maintenant j’ai mal au ventre tellement j’ai faim !
Connaissez-vous ce film ‘tampopo’ plein de poésie rameniène ?
Je testerai votre recette,c’est certain, et si ça pue,tant pis pour les voisins !
De très belles photos ! C’est très appétissant, je viens de me cuisiner des ramens ce midi 🙂
J’arrive à vous par hasard et je suis emballée par ce superbe blog, beau, bon et cultivant. Tout ce que j’aime et parfait pour accentuer ma furieuse envie de nourriture asiatique déjà largement exacerbée par ma grossesse 🙂 Bravo, milles bravo.
Superbe article et merci pour les photos !!!
Coucou Camille ? Des adresses pour manger des Ramens sur Nice ? (enfin les Alpes Maritimes). Merci beaucoup !
Je reviens avec mon envie de Ramens ^^ Si quelqu’un connait des adresses sur Nice et environ je suis preneuse ! Merci d’avance 😉
Bonjour,
Vous évoquez le Naritake Kotteri Rāmen. J’aurais bien aimé avoir votre avis sur ce restaurant. Je ne sais pas si vous y avez mangé depuis cet article ?
J’y suis allé aujourd’hui pour la première fois et j’avoue que je suis assez partagé, notamment sur le gout et la consistance du bouillon (au miso) : très, très, très salé, quasiment écœurant, très épais et extrêmement gras. Impossible de finir, j’ai du m’arrêter à la moitié. Après ça, j’ai filé chez moi pour faire une grosse sieste. N’étant jamais allé au Japon, je me demande si certains rāmens que l’on y mange sont comme cela ?
Bravo pour votre blog, un véritable plaisir à lire ! J’attends avec impatience vos nouveaux billets.
Bonjour Alexandre,
J’y suis allée il y a environ un an, et je n’ai pas aimé du tout. Bouillon trop épais, bien trop gras, trop salé effectivement, la viande n’était que du lard insipide, les nouilles n’étaient pas terribles (d’ailleurs on ne m’a même pas demandé quelle cuisson je voulais)… Et c’était cher ! Bref, à éviter absolument à mon avis. Il y a sûrement des mauvais restaurants de râmen au Japon, mais on trouve tellement de bonnes petites adresses que le niveau reste dans l’ensemble excellent. Et au pire, même si on tombe sur un très mauvais bol, ça ne coûte que 4 ou 5 euros, donc ce n’est pas très grave !
Merci pour votre réponse. Cela me rassure. Je commençais à avoir des doutes à force de lire et d’entendre qu’il s’agit d’un des meilleurs voire du meilleur restaurant de rāmens de Paris. Je suis entièrement d’accord avec vous.
Bonjour Camille,
Je suis tombé par hasard sur votre article sur les ramen. Bravo! Je la trouve très bien faite et me voilà donc en face d’une très bonne connaisseuse en la matière.
Si j’arrive à bout de mon projet, d’ici quelques mois j’espère ouvrir avec ma femme un restaurant de ramen à Toulouse. J’ai vécu plusieurs années au Japon et j’ai travaillé dans un ramen-ya. C’est vrai qu’il y a une multitude de recettes suivant les régions mais les goûts et couleurs ne se mélangent pas. Certains chefs se tracassent souvent pour créer ou développer leur bouillon ou leur nouille. Pour les néophytes, c’est un peu trop complexe je pense. Je n’y suis pas allé mais ce qui s’est passé à la « ramen week » peut-être. J’ai vu les photos et j’ai pu voir qu’il y avait de très grands chefs ramen que je respecte particulièrement. Ils étaient là surtout pour promouvoir les ramen à l’étranger. Les ramen malgré ses origines chinoises sont devenus et considérés depuis peu comme un plat national nippon comme les Sushi, tempuras, soba, etc…
Il y a donc des grands chefs ramen tout comme dans la cuisine française qui essaient d’innover et certains qui préfèrent rester dans le basique. Je suis dans la deuxième catégorie.
Cependant dans un pays où on trouve une multitude de ramen shop, pour pouvoir se démarquer de la rude concurrence il faut obsolument innover dans le concept, le service, la soupe, etc…
Concernant, les restaurants ramen à Paris, je suis moi-même un peu déçu mais ça reste quand même correcte tout comme fufu ramen à Bordeaux où ramen-ya Hiro à Barcelone. On ne peut pas dire que ce se soit mauvais parce qu’on ne trouve pas le même goût qu’au Japon car certains sont tenus par des japonais qui connaissent, aiment et ont grandi avec les ramen. Les ramen actuels ont été adaptés au goût des japonais et ça marche pour toutes les cuisines. En cuisine chinoise, le goût d’un même plat diffère selon les pays : en France, c’est un métissage sino-Viêt , au Japon, un goût plus léger, en Angleterre, plus salé, etc…
Ensuite sur les prix des ramen en France, c’est compliqué. Je suis moi-même concerné par ce problème en tant que futur ramen-ya san. La TVA n’est pas la même, on paie beaucoup de charges. Il y a le loyer, le salaires des employés, le droit au bail, l’achat des machines, l’achat des produits, …
Ouvrir un commerce n’est pas si simple en France! Au Japon, ce sont de grands mangeurs de ramen, mais en France pas encore. Il y a une demande certes mais c’est encore trop nouveau. J’aime ce que je fais, j’aime les ramen. Je ne cherche pas le profit ou la richesse mais je dois m’auto-suffire, payer mon loyer, nourrir ma famille, payer les taxes….
Au Japon, c’est pareille, faut savoir que la plupart des restaurants ramen ou autres ne roulent pas sur l’or et arrivent souvent tout juste à s’auto-satisfaire mais ils ont un plus gros rendement et demande qu’en France donc plus de chance de perdurer. Et Ils ont moins de charges salariales d’où l’existence de nombreux magazines hebdomadaires pour les petites jobs à temps partiel, les fameux « arubaito ». Et on paie pratiquement qu’en cash dans les restaurants, pas en CB ou chèques, il y a un cash-flow très important.
Ensuite, pour la préparation de la soupe, mettez-y quelques tranches de gingembres frais et la partie verte de 2 ou 3 poireaux pour masquer un peu le goût et l’odeur des carcasses.
Voilà, désolé d’avoir été un peu long, mais je voulais juste m’expliquer sur quelques points.
Merci et très bonne continuation.
Bonjour,
Article très bien écrit et ça me rassure de voir que les ramens ont une origine chinoise. Cela me rassure aussi qu’en France on trouve des ramens correctes (ne laissant pas un souvenir impérissable) et c’est pour cette raison que j’ai longtemps considéré le ramen comme une soupe bas de gamme par rapport aux soupes chinoises/vietnamiennes. Et puis je me suis dit « non c’est pas possible, un japonais n’accepterait pas de manger ce que je mange ». Et je me suis dis aussi plus généralement « mais en fait, il n’y a aucune bonne soupe asiatique en France.. »
J’espère quand même trouver un bon ramen à Paris !
Bonne continuation.
Bonjour, article super intéressant! Étant un mega fan de ramen, je pars au japon demain! Savez-vous si je peux trouver des cours de cuisine intensif et exclusivement dédié aux ramens sur Tokyo or Kyoto ?
Kyoto ce n’est vraiment pas le genre (trop snob pour les ramen), mais à Tokyo peut-être ; je ne sais pas pour les ramen précisément mais je sais qu’à Osaka par exemple, il y a des cours de cuisine orientés street food pour les touristes. Vous parlez japonais ?
Non pas du tout, merci pour votre réponse.