Le printemps, c’est la saison des pousses de bambou au Japon (pour apprendre à les préparer, c’est ici). Pour célébrer le renouveau de la nature, les Japonais sortent regarder les cerisiers en fleurs, mettent du rose, du vert et du blanc partout pour la fête des filles, Hinamatsuri, et mangent du takenoko gohan / 竹の子ご飯 / 筍ご飯, le riz aux pousses de bambou, dont je vais vous donner la recette. Alors ok, on est déjà en été, mais soyez indulgents : en France, les pousses de bambou sont disponibles toute l’année dans le commerce, donc n’avez pas de raison de m’en vouloir. Au pire des cas, gardez cette recette pour l’an prochain et ça ira bien.
La pousse de bambou, un aliment populaire
Les pousses de bambou, comme je l’explique dans cet article, sont très courantes dans toute l’Asie ou presque ; au Japon, on les appelle takenoko / 筍 / 竹の子 / タケノコ, et on les consomme principalement au printemps. Mais ce symbole printanier se trouve aussi en hiver, quand les pousses n’ont pas encore émergé, restant petites et très tendres, et en été pour d’autres variétés. Et à vrai dire, de nos jours, on en trouve plus ou moins toute l’année.
Le bambou a une forme tellement populaire qu’on peut l’utiliser comme un symbole, le styliser, et en faire complètement autre chose. L’un des biscuits favoris des Japonais par exemple, c’est le Takenoko no sato / たけのこの里 de la marque Meiji. Ça veut dire « pousses de bambou du village » et ce sont de minuscules biscuits en forme de pousses de bambou couvertes de chocolat. Ils font aussi des Kinoko no yama / きのこの山, les « champignons de la montagne », exactement sur le même modèle.
Takenoko gohan, l’un des riz mélangés japonais
Et puis le vrai bambou se retrouve aussi en cuisine, et a des usages assez variés. Mais ce qu’on aime par-dessus tout, c’est associer les pousses de bambou et le riz. Ce sont des ingrédients communs partout, même – et surtout – dans les campagnes les plus reculées, où aller cueillir des pousses de bambou est une activité assez triviale.
La préparation vraiment classique et incontournable au printemps, c’est le takenoko gohan donc, j’y viens, mais on peut aussi faire d’autres choses amusantes, comme ces pousses de bambou fourrées de riz que j’ai vues sur Shikoku.
Le takenoko gohan, c’est un riz mélangé – on appelle ça takikomi gohan / 炊き込みご飯 – en l’occurence aux pousses de bambou. Il existe d’autres sortes de takikomi gohan, toujours liées à des saisons, comme le riz aux champignons matsutake (matsutake gohan / 松茸ご飯) en automne, ou le gomoku gohan / 五目御飯, le riz aux cinq ingrédients, qui peut contenir là encore des champignons matsutake, des shiitake, des pousses de bambou, de la bardane, des huîtres, des noix de ginkgo, des châtaignes, etc.
Les légumes sont cuits directement avec le riz, puis mélangés après cuisson pour bien les repartir. Si ces riz sont « améliorés » et parfumés car cuits dans le dashi et la sauce soja, on les mange comme on mangerait du riz blanc, et on les retrouve aussi bien dans les restaurants que dans les bentō et la cuisine familiale toute simple, car c’est assez facile à faire.
Takenoko gohan : étape 1, le dashi
En fait, ce qu’il y a de plus compliqué dans l’histoire, c’est de trouver de quoi faire son dashi. Pour ceux qui ne le savent pas, le dashi c’est un bouillon, ou plutôt une base de bouillon, qui donne de la profondeur aux soupes, comme la soupe miso. Il existe deux solutions pour faire son dashi à la maison : la méthode pépère, avec du dashi instantané à diluer dans l’eau, et la méthode traditionnelle. Tous les ingrédients sont trouvables dans la plupart des bonnes épiceries asiatiques.
Faire son dashi : méthode express
Si vous utilisez du dashi instantané, faites bouillir de l’eau dans une casserole ou dans votre bouilloire, ajoutez des granulés de dashi, et puis c’est tout. En gros, une demi-cuiller à café de dashi instantané suffit pour 20 cl d’eau. En l’occurrence, pour cette recette, vous aurez besoin de 550 ml de dashi (donc environ 1 cuiller à café et demi de dashi en poudre).
Faire son dashi : méthode traditionnelle
Pour la méthode traditionnelle, il vous faudra du kombu et du kastusobushi (des flocons de bonite fermentée, fumée et séchée). Commencez par faire tremper un gros morceau de kombu dans 550 ml d’eau. Plus il y a de kombu, et plus il trempe longtemps, plus votre dashi sera parfumé. Un morceau de 10 grammes qui trempe toute la nuit, c’est très bien, mais si vous n’avez qu’une heure devant vous, c’est déjà ça.
Portez ensuite l’eau à ébullition avec le kombu dedans. Quand des bulles blanches commencent à apparaître à la surface de l’eau, chargées d’une bonne odeur de kombu (ce qui prend environ 5 minutes), vous pouvez éteindre le feu et retirer le kombu de votre casserole. Quand la température a baissé – aux alentour de 80° – ajoutez une bonne poignée de kastuobushi. Laissez infuser quelques minutes. C’est prêt, il n’y a plus qu’à filtrer le liquide pour retirer les flocons de bonite tombés au fond de la casserole. Une fois filtré, votre dashi est prêt à l’emploi.
Takenoko gohan : étape 2, la recette
Bien, maintenant qu’on a notre dashi, passons aux choses sérieuses. Pour faire du takenoko gohan, il vous faut :
- 300 g de pousses de bambou préparées (achetées dans le commerce ou faites maison)
- 400 g de riz
- 550 ml de dashi
- 1/2 aburaage (tofu frit)
- 1 c. à s. de saké
- 2 c. à s. de sauce soja claire
- Quelques kinome pour garnir (pousses de sanshō, facultatif)
Personnellement, l’aburaage n’est pas ma grande passion donc je m’en passe, d’autant plus que c’est très difficile à trouver dans ma région. Mais je vais vous donner la recette complète, à vous de voir ensuite si vous préférez l’omettre. Tous les autres ingrédients sont indispensables, à part les pousses de sanshō, car c’est encore plus compliquer à dénicher. Mais leur saveur qui rappelle les zestes d’agrumes apporte réellement quelque chose au plat.
Commencez par bien laver le riz à l’eau claire jusqu’à ce qu’il ne rende plus d’amidon. Laissez-le tremper dans le dashi durant 30 minutes dans le récipient de cuisson : une casserole ou un rice cooker. Personnellement, trouve que le rice cooker est très bien quand je suis pressée car il m’assure une cuisson du riz correcte et régulière. Mais pour un riz impeccable, je préfère la bonne vieille casserole.
Coupez les pousses de bambou en lamelles. Habituellement, on coupe la pousse de bambou en deux dans le sens de la longueur – ou en quatre, si elle est grosse et pleine – puis on fait des lamelles de ces quartiers, sauf du côté de l’extrémité en pointe qu’on va plutôt couper dans la longueur. Passez l’aburaage sous l’eau bouillante (c’est une manière de le dégraisser) puis coupez-le en lamelles de 3 cm de longueur.
La cuisson du riz
Ajoutez le saké et la sauce soja dans le récipient où reposent le riz et le dashi. Mélangez. Déposez les morceaux de pousses de bambou et d’aburaage par-dessus sans mélanger et couvrez.
Si vous avez opté pour le rice cooker, vous n’avez plus qu’à allumer la machine et la laisser faire. Si vous utilisez une casserole, commencez par porter à ébullition sur feu moyen-fort. Une fois l’ébullition atteinte, baissez le feu au minimum et laissez cuire jusqu’à ce qu’il n’y ait plus de liquide dans la casserole.
Ne découvrez jamais du riz qui cuit. Si vous voulez regarder, utilisez un couvercle en verre. Quand on cuisine au gaz, il faut compter environ 12 minutes pour atteindre l’ébullition, puis je laisse mijoter 8 minutes, soit 20 minutes en tout. Sur un feu électrique, qui met plus de temps à chauffer, il faut forcément plus de temps.
Quand le riz est cuit, laissez reposer 10 minutes, toujours sans découvrir. Ouvrez ensuite le couvercle et mélangez gentiment le riz, l’aburaage et les pousses de bambou sans écraser les jolis grains de riz. Servez dans des bols et garnissez de pousses de sanshō.
Bon appétit !
Looks good~
Bonjour,
J’ai déjà eu l’occasion de vous dire combien votre site était beau et bon. Je crois que je ne serais pas le seul à se réjouir de vous lire de nouveau. 🙂
Keep the beat!
A.
Superbe cette recette. Bravo!