Unagi, l’anguille japonaise
Le 29 juillet 2014, c’était le jour de l’anguille au Japon. Comme tous les ans, les Japonais s’en sont donné à coeur-joie, dévorant des tonnes d’anguilles d’eau douce, qu’on appelle ici unagi / 鰻 / うなぎ. Cela ne les empêche pas d’en manger le reste de l’année, mais au coeur de l’été, l’anguille est partout. On la mange grillée et couverte d’une sauce sucrée-salée fabuleuse qui charme même les étrangers les plus réfractaires à l’idée de goûter à ce poisson. Gros plan sur cette tradition culinaire unique vouée à disparaître.
L’anguille en question est une espèce à part entière : il s’agit de l’anguille japonaise, en japonais nihon unagi / 日本鰻, Anguilla japonica en latin. Comme nos anguilles européennes, elle est filiforme, fine et gluante. Elle mesure environ 50 cm à l’âge adulte pour les mâles, 1 m pour les femelles, et on la trouve dans les fleuves et les estuaires du Japon, mais aussi en Chine, à Taïwan, en Corée, au Vietnam et au nord des Philippines. Dans l’eau douce, la petite anguille japonaise grandit quelques années, mange comme une folle jusqu’à devenir bien grasse, puis part à la conquête de l’océan pour se reproduire aux alentours de la fosse des Mariannes.
Difficile de dire quand les Japonais ont commencé à consommer ce poisson, mais on en parle déjà dans le Man’yōshū / 万葉集, le premier recueil de poésie nipponne daté du VIIIème siècle. On y recommande de manger de l’anguille l’été pour rester en forme malgré la chaleur, une idée que l’on retrouve dans la médecine chinoise et qui s’applique aussi à d’autres animaux de forme similaire, les serpents et les serpents de mer.
Comme bien souvent dans les médecines traditionnelles, il y a une réelle raison à cela : l’anguille contient de nombreuses vitamines dont la vitamine B1 qui est hydrosoluble et que l’on perd donc en transpirant. Bon, en réalité, les autres poissons contiennent encore plus de vitamine B1 que l’anguille, mais cette dernière est bourrée d’acides gras insaturés et de vitamine A qui sont excellents pour la santé quelle que soit la saison. Peu importe, l’idée de manger de l’anguille l’été n’est pas une nouveauté.
Le jour de l’anguille
Ce qui est plus récent, c’est l’idée d’un « jour de l’anguille ». Il ne s’agit pas d’une fête officielle ; c’est un phénomène commercial qui remonte à l’époque d’Edo (1600-1868). Ce jour-là, c’est Doyō no ushi no hi / 土用の丑の日, qui marque le milieu de l’été et dont la date exacte varie tous les ans. Littéralement, Doyo no ushi no hi, c’est le « samedi du boeuf », ce qui prête à confusion. Le boeuf en question, c’est celui du calendrier traditionnel à la chinoise. Mais on ne le mange pas.
L’été, on a dit qu’on mangeait des anguilles pour rester en forme. Traditionnellement au Japon, on croit en effet qu’il est bon de manger des plats commençant par う – on va simplifier en disant qu’il s’agit de la lettre U – à cette époque de l’année, d’où le fait que ce poisson (Unagi /うなぎ) soit quoi qu’il arrive associé au paroxysme de l’été.
Seulement voilà, même à ces dates fatidiques, les anguilles ne se vendaient pas comme des petits pains à l’époque d’Edo, déjà parce que c’était cher, et puis aussi parce que les gens avaient probablement envie de manger autre chose. L’anguille, c’est très gras et très nourrissant, et quand il fait 40 degrés dehors, on a plutôt envie de manger léger.
Un restaurateur dont les ventes d’anguilles étaient en berne demanda conseil à l’incroyable pharmacologue/médecin/auteur/peintre/inventeur Gennai Hiraga qui devint de fait également consultant marketing. Gennai est très connu pour avoir passé des années à tisser de l’amiante, mais aussi pour avoir tué un de ses disciples un jour où il était pas content. Bref, il avait des petits problèmes. Mais on lui demande conseil, et conseil il donne : le restaurateur aurait tout intérêt à faire de la pub pour le gluant poisson un jour précis, le fameux Doyō no ushi no hi. Une opération commerciale, en somme. La formule eut un franc succès, au point de lier durablement ce jour et l’anguille partout au Japon.
Unagi no kabayaki, la recette
Les recettes ont évolué à travers les siècles, mais une chose est sûre : il n’y a jamais eu et il n’y aura jamais de sashimi d’anguille au Japon. La raison est simple : le sang de l’anguille est toxique pour l’homme et les mammifères en général. Une fois le poisson cuit, plus de danger, mais ne vous amusez pas à manger une anguille crue.
La manière la plus populaire de savourer l’anguille aujourd’hui au Japon, c’est de griller ses filets sur la braise en les couvrant d’une sauce sucrée-salée à base de mirin, de sauce soja et des arêtes de la bête. La technique est appelée kabayaki / 蒲焼 et elle existe au moins depuis l’époque de Muromachi (1336 – 1573). On la sert ensuite généralement sur un bol de riz qu’on appelle unadon / 鰻丼, la contraction du mot unagi (anguille, donc) et du mot donburi (bol).
Selon les régions, il y a différentes manières de faire le kabayaki. Dans le Kantō (autour de Tōkyō), l’anguille est grillée, puis cuite à la vapeur pour se débarrasser de l’excès de gras, et enfin grillée à nouveau. Dans le Kansai et plus à l’ouest, pas de cuisson à la vapeur : l’anguille est simplement grillée plus longtemps, ce qui lui donne une texture un peu plus ferme. On reste quoi qu’il arrive sur des consistances assez élastiques et très moelleuses à la fois, ce que les anglophones appellent chewy. Certains embrochent les anguilles pour les faire griller, d’autres les saisissent avec des pinces, les petites variantes sont nombreuses.
Démonstration en cuisine
Le plus simple reste encore de vous montrer tout ça, alors suivez-moi, on passe en cuisine. Personne ne prépare des anguilles à la maison au Japon, je vous amène donc dans un restaurant spécialisé à Hiroshima. Les anguilles sont achetées vivantes par l’établissement ; elles doivent être cuisinées très fraîches.
La préparation du poisson en soi demande un matériel spécifique et très beau : il vous faut un couteau à anguille, ou, comme on dit en japonais, unagisaki hōchō / 鰻割き包丁. Ses angles caractéristiques sont reconnaissables entre mille. C’est un couteau assez massif et lourd, avec une pointe acérée pour entailler facilement la peau glissante du poisson. La forme de la lame permet ensuite d’ouvrir l’animal sur toute sa longueur d’un geste continu. Il faut aussi une espèce de gros clou pour fixer l’anguille sur le billot. Et donc, forcément, il faut aussi un billot.
Il n’y a pas de mise à mort à proprement parler car tout va très vite : on attrape l’anguille, on la pose sur le billot, on lui plante le fameux gros clou dans la gorge pour la tenir en place, et d’un seul coup de couteau très aiguisé, zip, on l’ouvre de la tête à la queue. Il faut bien tenir la queue, car l’anguille, encore vivante, gigote tant qu’elle peut, glissant entre les doigts du chef.
Il pose son couteau, et retire les entrailles de la bête à la main. Elles sont mises de côté car certaines sont appréciées en cuisine, notamment le foie, qui peut être mangé grillé / kimoyaki / 肝焼き ou servi avec les reins et les intestins / kimosui / 肝吸い.
Il reprend ensuite son couteau pour retirer les arêtes avec une facilité déconcertante (en réalité ce n’est pas facile du tout, mais le monsieur a quelques dizaines d’années d’expérience). On passe la lame sous l’arête dorsale en-dessous de la tête et on la soulève sur toute sa longueur, le chef met environ 10 secondes à désosser l’anguille.
Ces arêtes sont mises de côté, elles sont précieuses. On s’en servira pour faire la fameuse sauce indissociable du kabayaki. Cette sauce, préparée à l’avance avec les arêtes recueillies précédemment, est épaisse, sirupeuse, brillante comme une sauce teriyaki, mais elle a le caractère bien particulier des os de poisson et des petits riens de chair qui en sont prisonniers. Elle est divine. On l’appelle kabayaki no tare / 蒲焼のたれ. Chaque restaurant a son secret de famille, les recettes sont gardées précieusement.
Une fois qu’elle a été vidée et désossée, l’anguille est plus ou moins saignée. Le billot est incurvé près du coin où le clou est planté pour recueillir le sang. De plus, le clou agit comme un drain. Le but est d’obtenir un poisson le moins sanglant possible, car, cuisson ou pas cuisson, avec un produit toxique à l’ingestion, on prend ses précautions.
D’un coup de lame, on coupe la tête de l’anguille, et voilà, elle est prête. Les poissons désossés sont rincés puis directement apportés au chef d’à côté qui se charge de les griller. Il les dépose délicatement sur le grill, côté peau. On est au coeur de l’été, il fait 40 degrés dehors, et près du grill, la température est difficile à supporter.
Il les tourne une première fois et fait des incisions dans la peau pour une cuisson parfaite. Car on garde la peau de l’anguille au Japon, on aime la peau des poissons. Déjà parce qu’on ne rajoute généralement pas de gras quand on les fait griller, et la peau des poissons est toujours grasse. Aussi parce qu’elle tient la chair en place, ce qui est bien pratique. Enfin, parce qu’on aime la faire croustiller. Une peau grillée, c’est joli et c’est bon.
Après cette première cuisson « à sec », le chef trempe les anguilles dans la sauce brune et les remet à griller. Il répète ce geste plusieurs fois, retournant les poissons après chaque bain de sauce. Ça caramélise, ça sent bon.
Servir l’unagi no kabayaki
Quand elles sont cuites, les anguilles sont caramélisées à souhait, cuites à point mais elles restent très tendres et juteuses. Quelques coups de couteau viennent leur donner un contour parfait. Ces « chutes » d’anguille serviront également en cuisine, comme les abats.
Le chef tranche les poissons au milieu, puis chaque demi-anguille est coupée en trois pour faciliter la dégustation qui se fera évidemment avec des baguettes. L’anguille est déjà prédécoupée dans le sens de la longueur puisqu’ils s’agit des deux filets du poisson, donc couper en trois revient en réalité à couper les demi-poissons en six morceaux de taille raisonnable.
On dépose l’anguille sur du riz, soit dans un bol (unadon), soit dans une belle boîte rectangulaire en bois laqué (unajū / 鰻重, en photo plus haut) soit dans un gros bol à la forme un peu particulière – il est vraiment arrondi, bien enflé au fond et légèrement plus étroit au sommet – où l’on mélangera joyeusement le poisson et le riz (hitsumabushi / 櫃まぶし). Quand on a mangé la moitié du bol environ, on ajoute un peu de dashi pour faire une sorte de soupe.
On peut aussi demander l’anguille et le riz séparément (nagayaki / 長焼き). On mange généralement l’unagi après l’avoir saupoudrée de sanshō, un poivre qui n’en est pas un au sens botanique du terme et qui présente des saveurs aussi poivrées qu’acidulées. Cet arôme flatte admirablement la chair grasse du poisson et sa sauce sucrée et corsée, c’est un véritable délice.
Tout le monde n’en raffole pas cependant. En tous cas, pas au point de casser sa tirelire. L’anguille est très chère en comparaison à la plupart des plats que l’on peut manger au Japon. Il faut compter 1500 yens environ, soit 11 euros pour une demi-anguille, 2500 à 4000 yens soit 18 à 30 euros pour une anguille entière, même achetée de manière informelle au marché. Au restaurant, c’est souvent encore plus cher.
L’anguille en voie d’extinction
Le restaurateur d’Hiroshima qui m’a ouvert sa cuisine m’explique que les jeunes se désintéressent de ce poisson, jugé trop cher. À ce prix-là, ils préfèrent se payer un bon gros steak, parce que le boeuf c’est cher aussi au Japon, mais c’est clairement plus à la mode. Alors qui sont ses clients ? Principalement des vieux. « La clientèle âgée est notre principale cible, parce qu’ils ont généralement les moyens de s’offrir ce poisson, mais aussi parce qu’ils n’ont plus de très bonnes dents, » explique-t-il. Et l’anguille, c’est plus mou et plus facile à manger que du steak, surtout quand on a des chicots.
Oui mais voilà, si les jeunes boudent l’anguille, ce n’est pas seulement parce que c’est cher. C’est aussi parce que la situation de ce poisson est alarmante, et, si on voulait bien faire, on ne devrait pas en manger du tout. Il est tout simplement en train de disparaître, et on n’arrête pas d’en pêcher pour autant. On va au contraire aller en chercher ailleurs, en Chine et à Taïwan principalement. Cela permet de combler le manque de la production japonaise, et puis c’est moins cher. Bon, c’est souvent dégueulasse d’un point de vue sanitaire et c’est abominable d’un point de vue écologique, mais de toutes façons l’anguille japonaise est foutue. Foutu pour foutu, autant y aller gaiement.
Comme c’est un vaste sujet, je vais y consacrer un autre article. Après les réjouissances de la table, nous allons regarder le côté obscur de ces histoires d’unagi. Au programme, il y aura une rencontre avec des producteurs japonais, un état des lieux des ressources et un coup d’oeil vraiment pas glop sur les anguilles qu’on vous sert dans les établissements pas chers du Japon et dans les restaurants japonais en France.
En attendant, pour les amateurs d’anime, voici un épisode du Petit Chef sur les délicieuses anguilles en kabayaki. La traduction est assez hasardeuse à pas mal de moments, mais on a droit aux « prouesses » du doubleur français qui faisait TOUTES les voix de TOUS les personnages de TOUS les anime de cette époque. Merci à la Petite Banane pour le lien !
Le petit chef – Les anguilles du chef
Chaque fois que j’en mange, j’ai des larmes lumineuses qui perlent aux coins de mes yeux, comme dans cet épisode mémorable de Petit Chef : http://www.dailymotion.com/video/x6iet_le-petit-chef-les-anguilles-du-chef_news. J’en ai mangé des vraiment dégueulasses en France, avec des arêtes dedans et tout, alors après ton prochain article, je ne vais sûrement plus jamais en manger.
Merci pour ce super article ! Les photos sont magnifiques et les anecdotes du début assez amusantes. Quoique maintenant, je suis assez frustrée de savoir que j’ai raté la fête de l’anguille quand j’étais au Japon.
J’aime beaucoup le kabayaki d’anguilles, mais effectivement, je ne me vois pas préparer ça chez moi. Je dois aussi avouer que c’est le prix qui me limite plutôt que la quasi-extinction de l’espèce. Mais la preview de ton prochain article me dit que ça ne vas pas tarder à changer…
une fois de plus, un article top, merci!
Bon déjà, il me faut un couteau comme celui-là, il ne doit pas être simple à aiguiser, mais il est vraiment trop beau…
L’anguille (et le congre) est le seul serpentiforme dont j’ose m’approcher, et cette recette est ma préférée entre toutes, dommage que la rareté de ce poisson m’empêche d’en manger autant que je le voudrais.
Je connais une blogueuse qui en a fait une adaptation sur le maquereau, ce n’est pas bête du tout, même si ce n’est pas tout à fait la même chair, c’est crédible, je n’ai toutefois pas encore essayé.
http://www.lescuisinesdegarance.com/2010/03/saba-like-unagi-le-maquereau-laque-la.html
Elle a raison Nathalie, on applique le kabayaki à pas mal de poissons au Japon : anguille, anguille de mer, murène du Japon, carpe, gonelle, poisson-chat, Cololabis saira pour ne citer qu’eux !
Et si tu veux que je te rapporte un couteau du Japon l’hiver prochain, pas de problème, c’est facile à trouver ça ! La forme est légèrement différente d’une ville à l’autre. Les principales variantes sont celles de Tokyo, de Nagoya, de Kyoto et d’Osaka il me semble. Celui que j’ai pris en photo est vraisemblablement dans le style d’Edo (de Tokyo), on l’appelle Edosaki du coup.
Y a pleeeeein de tailles différentes aussi http://thumbnail.image.rakuten.co.jp/@0_mall/hamonoichiba/cabinet/test/img57437957.jpg
On va en recauser, forcément. Je te laisserai choisir la forme, tu me connais assez pour bien choisir. Je relis ce billet au petit matin (il est 6H à Montréal), et en revoyant tes photos du dépeçage de l’anguille, je me dis que ce n’est pas du blog de gonzesse 😀
Ça c’est un compliment !
J’étais très contente de voir le fils de mon ami Yuhki, le mini-Hiroaki, âgé de 8 ans à peine, et dont la mère est une vegan invétérée (qui lui impose une alimentation vegan, sauf le weekend), émerveillé devant ce type qui découpait les anguilles à la chaîne. Ça ne lui a pas coupé l’appétit du tout, au contraire. Les gamins au Japon savent d’où viennent ce qu’ils mangent. Ils savent que l’anguille n’arrive pas toute belle dans l’assiette comme par magie. C’est important.
On en parlait d’ailleurs avec Aaron la dernière fois, il me disait : « C’est important de le montrer, la cuisine c’est aussi… » (il cherchait le mot en français, il ne voulait surtout pas dire sale)… « messy. »
Qu’en est-il de l’anguille fumée ? Est-ce aussi une spécialité ancienne du Japon ? Merci pour cet article fouillé.
Cela doit bien exister dans un bled rigolo, car on fait de tout avec tout au Japon, mais ce n’est pas une tradition. Les Japonais se concentrent sur l’anguille fraîche. C’est plus un truc d’Européens ça, de Germaniques, de Slaves et d’Anglo-saxons en particulier. Quant à l’anguille en gelée à l’anglaise, je n’ai jamais essayé et ça m’intrigue !
Tres belles photos grâce aux quelles je me suis souvenu de quelques beaux moments avec mon père. J’aimais bien aller au grand marché de poissons au dimanche avec lui. Nous faisions des courses et regardions les animaux rares, comme des requins entiers, des poulpe géants et crustacé blizzards…un vrai zoo, mais mieux, parce que on peut les toucher !
J’ai passé un temps fou devant la scène de préparation de unagi, car la tête bougeait encore même après la coupe… C’est curieux que cela ne me faisais pas peur .
Je pense que a poudre de sansho doit être du poivre du Sichuan.
Ah les marchés aux poissons en Corée sont géniaux. J’ai adoré celui de Busan, il y avait des trucs un peu fous qu’on ne verra jamais dans un marché japonais !
Le poivre du Sichuan c’est vraiment très différent du sansho, ça pétille dans la bouche… Je hais ce truc. Alors que le sansho, j’adore, c’est doux et frais et citronné et poivré à la fois. C’est marrant, ça fait plusieurs fois que je me retrouve à parler de ces deux poivres avec des gens et tous semblent avoir un avis différent sur ce qu’est le sansho et ce qu’est le poivre du Sichuan… Je me demande pourquoi.
Alors je sais qu’en japonais il y a parfois confusion sur le terme, parce qu’il arrive qu’on appelle sansho le poivre du Sichuan, mais au niveau du goût, on ne peut pas se tromper : l’un est acidulé, l’autre est à la limite de « l’effervescence » et finit par endormir la langue après lui avoir infligé des sortes de décharges électriques. Ça met du temps à passer en plus, c’est l’horreur.
En tous cas c’est bien le sansho et non le poivre du Sichuan qu’on utilise généralement avec l’anguille, et en l’occurrence, ce que nous avons mangé ce jour-là, c’était du sansho, sûr de sûr.
Très bel article, merci.
Lorsque j’étais au Japon, je suis allé chez Nodaiwa, spécialisé dans l’unagi depuis plus de 200 ans ! J’y suis allé en trainant la patte, car j’étais bien au courant de la situation déplorable de l’anguille… J’ai beaucoup aimé la délicatesse et subtilité de ce plat, mais n’ai pas ressenti qu’il en « valait la peine », ni pour le prix, ni pour l’anguille. Je ne dis pas que je ne me suis pas régalé, mais on peut se régaler d’un katsudon.
Certains mets sont rares et chers, mais exceptionnels, celui-ci n’est « que » bon… je trouve…
C’est bien dommage que les espèces soient en train de disparaître. Dans la cuisine japonaise, le unadon (en tout cas sur la base du souvenir d’un très bon que j’ai mangé il y a longtemps) est le seul plat que je trouve vraiment excellent ; le reste de la cuisine japonaise, bof, bof, ça ne casse pas trois pattes à un canard laqué… Je préfère mille fois la cuisine coréenne ou thaïlandaise.
Mais pour les plats à l’anguille, il y a en Belgique, une fois, un autre plat succulent : l’anguille au vert.
Ce sont des morceaux d’anguille (non fumée, et avec l’arête) cuits dans une sauce onctueuse littéralement blindée de tout un tas de différentes herbes vertes finement ciselées (d’où le nom “au vert”) :
https://fr.wikipedia.org/wiki/Anguille_au_vert
Il y a plus de six mois j’en ai trouvé dans l’un des meilleurs traiteurs d’Uccle, bourgade de Bruxelles truffée de grosses truffes françaises milliardaires, et franchement, c’était à pleurer de joie tellement c’était bon (ma tata et mon tonton, qui n’avaient pas mangé d’anguille depuis 20 ans, m’ont accompagné dans la joie et l’allégresse). Je n’en ai pas revu depuis chez eux, à mon grand désarroi.
Le problème avec l’anguille au vert, comme pour les préparations japonaises disponibles à Paris ou ailleurs en France ou en Belgique dans les restaurants “japonais”, c’est que c’est hyper difficile d’en trouver un de bien préparé, avec de l’anguille cuite comme il faut (pas trop ni pas assez) et une sauce vraiment faite avec des herbes FRAICHES. J’ai eu le malheur d’en commander dans un restaurant soi-disant spécialisé dans le poisson à Bruges, et c’était dé-gue-la-sse (je n’ai pas fini d’ailleurs, alors que je finis toujours, par principe, même quand je n’aime pas ; pour vous dire à quel point ce n’était pas bon).
Bref, tout ça pour dire qu’il est vraiment dommage que ces délicieuses bestioles continuent à être pêchées au péril de leurs espèces, si c’est pour finir mal préparées et cuisinées par des sagouins qui n’en font que de la grosse daube immonde, que ce soit à la sauce flamande ou japonaise.
Bonjour ! Je suis fan des anguilles au vert, que Maman cuisinait à la perfection, avec oseille et autres herbes fraîches, je n’en ai jamais goûté qu’une seule fois qui m’ont rappelé ce plat succulent de mon enfance, c’était à Mont Saint-Amand, en Flandre, le long de l’Escaut, près du tombeau du grand poète en langue française, Emile Verhaeren (à côté de son musée, d’ailleurs), c’était le jour de mon anniversaire, en compagnie d’une amie d’enfance, ça a été fameux comme repas ! C’est une spécialité flamande qui se mérite et franchement, ce n’est pas souvent le cas, un nouveau restaurant chic et à la mode, rue Fossé-aux-Loups, à Bruxelles, a eu l’audace de le présenter sur sa carte, je me suis laissée prendre, c’était d’une fadeur affligeante, je pense que ce n’était même pas digne de certains plats surgelés bien plus honorables, c’était une gelée verte, tout simplement, je pense qu’il n’y avait même pas l’assaisonnement minimum…
Bravo pour ce billet très bien documenté. J’en ai mangé dans une très belle taverne à Hiroshima près de l’embarcadère des bateaux pour le temple de Miyajima. Est-ce le même où vous avez fait les photos?
Merci Philippe,
Il ne s’agit pas du même restaurant, le mien est plus près du centre, c’est l’adresse de référence des locaux apparemment. C’est mon ami Yuhki qui m’y a emmenée, je ne l’aurais sûrement pas trouvée seule…
Découverte du blog hier, premier article que je lis, et déjà premier commentaire tant ton article m’a fasciné. C’était à l’époque mon plat japonais préféré : je l’ai découvert lors d’un voyage à travers la côte Ouest des Etats-Unis, à San Francisco. Sûrement pas le lieu idéal pour s’initier à ce plat traditionnel, j’en conviens, il m’a néanmoins charmé : il faut dire que les gens se battaient pour manger dans ce restaurant, et nous avons bien du attendre 45 minutes pour pouvoir enfin nous asseoir. Succès mérité donc.
Depuis, j’ai sauté sur chaque occasion pour pouvoir re-savourer un tel délice, mais rien à faire : jamais il ne fut aussi succulent que la première fois. Parfois très bon, d’autres fois juste bon, et quelques fois franchement mauvais. Mais la Belgique ne possède pas beaucoup de grand restaurants de ce type, malheureusement. Il y en a tout de même l’un ou l’autre qui sort du lot, m’enfin, le prix aussi sort du lot.
Tout cela pour dire que la lecture fut très intéressante : article bien rédigé, informations claires et précises, photographies magnifiques (malgré le thème assez .. barbare ? Le terme est trop fort mais je n’en trouve pas d’autre pour le coup) et anecdotes très sympathiques. J’ai hâte de lire le reste !
J’attends la suite avec impatiente, bien qu’elle s’annonce plus « sombre ». Merci pour ce travail et bonne continuation.
Bonjour Camille ,
je viens de tomber sur ta publication concernant la préparation de l’unagi , mets que je mange presque à chacune de mes visites dans les restaurant japonais lors de mes voyages fréquents à Singapour ou autres pays d’Asie du Sud Est .
C’est sans aucun doute une de mes mets préférés et mon manque d’unagi m’a conduit à faire cette recherche sur le net !
Je vous félicite vraiment , tant pour la richesse des textes que des illustrations qui m’ont beaucoup appris!
Je vous envois mes salutations les meilleures de la Suisse !
Cordialement , Roland Morard
Bonjour,
Merci pour cet article très interessant. Je l’ai trouvé en cherchant « anguille grillée » après avoir vu le dernier épisode de Ben-To où justement ils mangent des bento à l’anguille grillées :p
Du coup, je poste ce commentaire pour savoir si l’autre article, sur l’anguille japonaise, annoncé était sorti ou pas, car ça m’interesse grandement et je ne l’ai pas trouvé dans le moteur de recherche.
Merci 🙂
Bonjour Christopher,
J’ai honte mais non, je n’ai jamais eu le temps de finir de l’écrire, il est dans les tiroirs, comme de très nombreux papiers du blog…
ah ouki, tant pis ^^’
Ah je vous ai retrouvée.. en faisant une recherche sur l’anguille japonaise. Anguille que je n’ai pas eu l’occasion de goûter sur place mais dans le restaurant parisien Nodaïwa, et maintenant le chef de Jin Paris étoilé Michelin dit qu’en janvier il proposera des anguilles grillées mais qu’une partie du travail sera à faire à la maison?!?
Merci de ce long article, passionnant et agréable à lire, comme toujours.
Bonjour Marie, merci !
J’ai été très déçue par Nodaiwa (il y a des années), leurs anguilles m’ont paru vaseuses, rien à voir avec l’anguille japonaise… Je ne sais pas si celles qu’ils servent viennent de Chine, de Taïwan ou de Corée. Et je me demande d’où viendront celles de Jin, étant donné que celles du Japon ne peuvent être exportées… Aussi, sa petite phrase est bien énigmatique : faudra-t-il du travail à la maison pour le chef ou les clients ?