le manger

  • RSSRSS
  • Reportages
  • Ethno
  • Recettes
  • Restaurants
  • Contact
  • Chine
  • Corée
  • France
  • Indonésie
  • Japon
  • Philippines
  • Taïwan
  • Thaïlande

A la une · Chine · Ethno · Taïwan

L’oeuf de Colomb et les Bateaux-dragons

  • Share on Facebook.
  • Share on Twitter.

Aujourd’hui, c’est la fête à Taïwan, ainsi que dans tous les pays qui ont adopté une tradition venue de Chine : Duānwǔ Jié / 端午節, la fête des Bateaux-dragons. En Malaisie, au Vietnam, à Singapour, au Japon et en Corée, le cinquième jour du cinquième mois lunaire, on célèbre l’entrée dans la saison des pluies, des chaleurs estivales et puis, cela va avec, des épidémies. Youpi.

Au programe des rejouissances, il y a du vin soufré, des courses de bateaux, du riz cuit dans des feuilles de bambou, mais surtout un jeu auquel se prêtent les enfants, sur lequel je vais m’attarder : faire tenir des oeufs debout à midi.

Joanna qui galère avec son oeuf © Camille Oger

Joanna qui galère avec son oeuf © CO

Vous connaissez sûrement l’histoire de l’oeuf de Colomb, qui avait été défié par un malotru assis à sa table à la Cour d’Espagne de faire tenir un oeuf debout. L’oeuf était dur, le navigateur avait donc pu en aplatir l’extrémité avec sa cuiller, lui offrant toute la stabilité nécessaire à son érection, avec la formule : « C’est simple, il suffisait d’y penser. »

Pour la fête des Bateaux-dragons, mes colocataires taïwanais m’ont expliqué que la tradition voulait, à midi, que l’on puisse faire tenir des oeufs debout, mais des oeufs crus, et sans tricher. Pas question d’aplatir quoi que ce soit, l’oeuf tient tout seul comme un grand. Alors moi évidemment, j’étais sceptique. Je n’avais qu’une hâte : tenter l’expérimentation pour vérifier cette légende bien étrange.

Faire tenir un oeuf debout ? Fastoche

A midi donc, me voilà en position. J’arrive à faire tenir mon premier oeuf sur la table en verre du salon en dix secondes, pas plus, et il tient, il tient bien. Je vous laisse juger, en voici la preuve, je n’ai utilisé aucun artifice.

L'oeuf qui tient debout tout seul © Camille Oger

L’oeuf qui tient debout tout seul © CO

Je dois avouer que je trouve ça complèment fou, alors j’essaie avec d’autres. J’en pose trois sur le carrelage, et eux aussi restent droits. Ca fait limite magie noire. Ils sont en photo en tête d’article, les voici sous un autre angle. Mes colocs Munkhmandakh, Padraic et Joanna n’ont jamais réussi, ils ont perdu patience. J’étais la seule fêlée à m’agiter autour de mes oeufs en poussant des cris au milieu du salon.

Trois oeufs debout sur le carrelage du salon © Camille Oger

Trois oeufs debout sur le carrelage du salon © CO

Bon, cela dit, je suis restée sceptique jusqu’au bout, et je me suis dit que cela devait en réalité être possible toute l’année, je n’avais simplement jamais eu l’idée d’essayer. Il doit bien y avoir un point d’équilibre, qui, une fois atteint, permet à l’oeuf de tenir sans la moindre béquille sur une surface lisse. Alors je me suis renseignée. Et je suis tombée sur une explication scientifique extrêmement poussée réalisée par le physicien David W. Allan.

La nouvelle théorie de la gravitation pour explication

Attention les yeux, il explique que c’est effectivement possible toute l’année, il suffit de bien positionner son oeuf. Les aspérités de la coquille aident, mais ce ne serait pas tout. Les équinoxes seraient le moment le plus propice pour réussir l’opération, selon la nouvelle théorie de la gravitation. En effet, à ce moment l’axe de la Terre a exactement l’angle adequat, permettant aux lignes gravitationnelles de la Terre et du Soleil de gagner en symétrie. Les électrons libres contenus dans un oeuf peuvent alors voyager le long de ces lignes, ce qui améliorera sa stabilité.

Vous n’avez rien compris ? On va dire que j’explique mal. Le Professeur Allan, qui est juste allumé comme il faut et visiblement fort sympathique, a des tartines de théorie et d’expérientations pour vous sur cette page avec des graphiques, des photos de sa cuisine et de son piano, c’est complètement génial. Bon, du coup je ne sais pas si le solstice marche plus ou moins que les équinoxes, en tous cas, ça marche.

Un dragon endormi, des sacrifices humains, bref, un rituel à l’ancienne

Course de bateaux-dragons à Taipei

Course de bateaux-dragons à Taipei

Une fois l’euphorie de l’oeuf debout passée, regardons un peu cette fête des Bateaux-dragons, elle a un bien chouette nom, mais qui sont ces bateaux, et ces dragons ? Les bateaux, ce sont des types de pirogues à proue en forme de tête de dragon, avec à leur bord une équipe de 22 hommes : 20 pagayeurs, 1 barreur, 1 batteur qui tape sur son tambour pour donner le rythme.

Les équipages vont s’affronter toute la journée dans une multitude de courses sur la mer ou sur un fleuve, tout dépend de l’endroit.

Le dragon n’est pas arrivé sur le bateau par hasard. Le ritel du Bateau-dragon (inscrit au patrimoine mondial de l’Humanité soit dit en passant) remonte à la même époque que les premiers jeux olympiques. On disait alors que l’été était la saison du vénéré dragon, qui sortait de sa torpeur hivernale.

Pour fêter son réveil, on organisait ces courses dangereuses. Chaque année, pas mal de participants mouraient noyés, ce qui était considéré comme une bonne chose : faire des sacrifices pour le dragon, c’est toujours bien vu.

Le vin soufré, le remède qui rend malade

Aujourd’hui, les courses ont toujours lieu de la même manière, sauf qu’il y a moins de morts. Pendant qu’on regarde les bateaux aller et venir, on mange et on boit.

Traditionnellement, la boisson de rigueur, c’est le vin soufré, xióng huáng jiǔ / 雄黃酒, censé protéger des maladies qui courent l’été (pas la maladie d’amour, plutôt les épidémies bien sales). Avec le temps, on s’est rendu compte que non seulement il ne protégeait de rien, mais qu’en plus il était carrément dangereux pour la santé. Du coup, on en boit nettement moins de nos jours. Nous utilisons nous aussi des sulfites dans le vin, mais à faible dose ; en Chine les quantités considérables rendent ce vin toxique.

Et puis la star de la fête des Bateaux-dragons, c’est le riz gluant cuit dans une feuille de bambou, appelé zongzi / 粽子 – à Taïwan c’est un peu différent, c’est 臺灣粽. Le rapport avec les bateaux n’étant pas évident, voici la petite histoire : Qu Yan, un poète super patriote, s’est jeté dans le fleuve Miluo en 278 avant J.C. à la prise de Yingdu, la capitale du Royaume de Chu dont il était originaire, par les voisins Qin. Il était triste. La légende veut que les habitants de la ville aient jeté des petits paquets de riz dans les eaux pour nourrir les poissons, de manière à ce qu’ils ne touchent pas au corps du poète le temps qu’on le repêche.

Du riz-surprise cuit dans les feuilles de bambou

Cette histoire a été incluse dans la tradition des Bateaux-dragons : un fleuve, de la poésie, des jeux, du manger, hop, on a une fête qui se tient et qui est devenue un rituel complet. Dans le riz, on a rapidement ajouté plein de petites choses amusantes, comme des graines de lotus, du poulet, des cacahuètes, des oeufs de canard salés et j’en passe. Le tout est cuit à la vapeur ou bouilli. On obtient ainsi des petits paquets parfaits, ficelés pour les tenir en forme.

Zongzi, riz glutineux cuit dans les feuilles de bambou © Camille Oger

Zongzi, riz glutineux cuit dans les feuilles de bambou © CO

Quand on ouvre la feuille, le riz est agglutiné en pyramide, criblé d’ingrédients à découvrir à mesure qu’on le décortique ou qu’on le croque. J’ai pu en manger également au Japon, d’ailleurs si vous avez l’oeil vif vous remarquerez que ma photo a été prise là-bas, on le voit à l’étiquette qui porte une inscription en Japonais et non en Chinois. En fait c’est un mets très répandu en Asie de l’Est, à peu près tous les pays de la région en préparent au même moment de l’année.

Zongzi au poulet © Camille Oger

Zongzi au poulet © CO

Voilà, vous savez tout. Je compte sur vous pour vous ruer sur vos oeufs et vous lancer dans une activité passionnante ce week-end : tenter de les faire tenir debout, mieux que Christophe Colomb, sans triche. Le premier qui y arrive a gagné.

Tags: oeufreligionsaison

  • Share on Facebook.
  • Share on Twitter.

    Sur le même thème

  • Tofu, l'anthologie - la bible du tofu en 170 recettes et des pages de reportage en Asie Vous saurez tout sur le tofu
  • Takenoko gohan ou riz aux pousses de bambou © Camille Oger Takenoko gohan, riz aux pousses de bambou
  • Pousse de bambou du jardin © Camille Oger Préparer les pousses de bambou
  • Olives et kimchi, pour notre livre L'art de la fermentation © Camille Oger L’art de la fermentation

4 Comments

  1. vanlef dit :
    14/12/2012 à 15:52

    « Aujourd’hui », c’est quand? je ne vois pas la date? Merci pour les articles très intéressants.

    Répondre
    • Camille Oger dit :
      14/12/2012 à 16:11

      C’est vrai, les dates ne s’affichent plus, du coup ça prête à confusion. Aujourd’hui, en l’occurrence, c’était le 23 juin 2012. En 2013, ce sera le 12 juin.

      Répondre
      • anto dit :
        09/01/2018 à 12:22

        bonjour camille , et en 2018 ?

        Répondre
        • Camille Oger dit :
          09/01/2018 à 14:45

          Bonjour Anto,

          Ce sera le 18 juin !

          Répondre

Laisser un commentaire

Cliquez ici pour annuler la réponse.

  • Mes livres
    • L'odeur des paniers vapeur à Langzhong, avant le coronavirus © Camille OgerCoronavirus : manger sans odorat29/03/2020
    • Tofu, l'anthologie - la bible du tofu en 170 recettes et des pages de reportage en AsieVous saurez tout sur le tofu11/12/2019
    • Tempura de fleurs de courgette © Camille OgerTempura de fleurs de courgette (vegan et pas vegan)07/09/2014
    • Petits farcis niçois © Camille OgerLes meilleurs farcis du monde29/07/2014
    • Salade niçoise contemporaine © Camille OgerLa salade niçoise, la vraie !25/05/2014
    • Racine de wasabi, utogi © Camille OgerVous saurez tout sur le wasabi08/12/2012
    • Recent
    • Popular
    • Tags
    • L'odeur des paniers vapeur à Langzhong, avant le coronavirus © Camille OgerCoronavirus : manger sans odorat29/03/2020
    • Tofu, l'anthologie - la bible du tofu en 170 recettes et des pages de reportage en AsieVous saurez tout sur le tofu11/12/2019
    • Takenoko gohan ou riz aux pousses de bambou © Camille OgerTakenoko gohan, riz aux pousses de bambou18/07/2016
    • Pousse de bambou du jardin © Camille OgerPréparer les pousses de bambou01/07/2016
    • Salade de fleurs de glycine © Camille OgerMangez votre glycine22/04/2016
    • Feuilles de cerisier et sakuramochi © Camille OgerSakuramochi de Tokyo, la recette03/04/2016
    • Le durian, fruit qui pue, fruit qui tue15/11/2011
    • Plaqueminier en automne © Camille OgerLa magie du kaki25/11/2012
    • Tourte de blettes © Camille OgerLa tourte de blettes, la vraie !28/12/2012
    • Poisson perroquet grillé au lato, Palawan © Camille OgerÇa se mange un poisson-perroquet ?12/04/2013
    • Japonais mangeant des soba accroupi, époque EdoManger accroupi, manger assis01/06/2013
    • Râmen de Hakata © Camille OgerRâmen de Hakata : la recette du tonkotsu18/04/2014
    • ail algue balut barbecue boeuf boisson champignons coquillages crevettes cuisine niçoise dessert fast food fleur fruits glace goût halo halo luxe légumes marché marketing nouilles oeuf pharmacopée piment plantes plateau-repas poisson porc poulet printemps produits japonais pêche religion restaurant japonais saison sashimi soupe street food sushi temari sushi thon viande vinaigre végétarien
  • Follow @heimsendi
  • Blogroll
    En français
    • Chez Food
    • Cuisine de la mer
    • Cuisine campagne
    • Le foodblog de Chihiro
    • Esterkitchen
    • Le gastronome parisien
    • J'veux être bonne
    • La peau d'ourse
    • Sinogastronomie
    • La table de Diogène est ronde
    • Un déjeuner de soleil

    En anglais
    • Anything also eat
    • Asian in America
    • Astig vegan
    • Burnt lumpia
    • Candy blog
    • Chubby hubby
    • Just hungry
    • Looking for great food
    • Nordljus
    • The scent of green bananas
    • Shizuoka Gourmet
    • Tangled noodle
  • Reportages
  • Ethno
  • Recettes
  • Restaurants
  • Contact
  • RSSRSS

© Camille Oger 2011-2020